Spoofing téléphonique et responsabilité du banquier
Le client qui se fait piéger au téléphone par un faux conseiller bancaire ne peut se voir reprocher par sa banque d’avoir commis une négligence grave. Il a donc le droit d’être remboursé par sa banque des virements frauduleux.
En l’espèce, le client d’une banque a été contacté par téléphone par une personne se faisant passer pour une préposée de l’établissement lui demandant d’ajouter, grâce à ses données personnelles de sécurité, cinq personnes sur la liste des bénéficiaires de virements. Il a, par la suite, constaté que plusieurs virements frauduleux avaient été réalisés pour un certain montant sur son compte bancaire et en a alerté la banque le jour même. La banque, assignée par le client en remboursement de ces sommes, a été condamnée à cet égard par la cour d’appel, estimant qu’il n’avait pas commis de négligence grave (
À la question de savoir si une personne qui contribue indirectement à se faire escroquer en suivant les consignes d’un faux conseiller bancaire commet une négligence grave qui la prive du droit à être remboursée par sa banque, la Cour de cassation a répondu par la négative.
Elle approuve la décision de la cour d’appel qui, après avoir exactement énoncé qu'il incombe au prestataire de services de paiement de rapporter la preuve d'une négligence grave de son client :
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constate que le numéro d'appel apparaissant sur le téléphone portable du client s'était affiché comme étant celui de sa conseillère et retient que ce dernier croyait être en relation avec une salariée de la banque lors du réenregistrement et nouvelle validation qu'elle sollicitait de bénéficiaires de virement sur son compte qu'il connaissait et qu'il a cru valider l'opération litigieuse sur son application dont la banque assurait qu'il s'agissait d'une opération sécurisée ;
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ajoute que le mode opératoire par l'utilisation du « spoofing » a mis le client en confiance et a diminué sa vigilance, inférieure, face à un appel téléphonique émanant prétendument de sa banque pour lui faire part du piratage de son compte, à celle d'une personne réceptionnant un courriel, laquelle aurait pu disposer de davantage de temps pour s'apercevoir d'éventuelles anomalies révélatrices de son origine frauduleuse.
Au regard de ces circonstances, pour la Cour de cassation, la cour d’appel a pu déduire qu’aucune négligence grave au sens de l' ne peut être imputée au titulaire d'un compte qui, contacté téléphoniquement par une personne se faisant passer pour un préposé de sa banque dont le numéro s'affichait, utilise à sa demande le dispositif de sécurité personnalisé pour supprimer puis réinscrire des bénéficiaires de virements dans le but d'éviter des opérations malveillantes. Le pourvoi de la banque est rejeté.