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LFSS pour 2024 : le Conseil constitutionnel censure des dispositions relatives à la suspension du versement des indemnités journalières

Jurisprudence

Saisi par 2 recours, émanant l’un et l’autre de plus de 60 députés, sur la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2024, le Conseil constitutionnel a censuré ce jour, 21 décembre, outre 8 « cavaliers sociaux », des dispositions relatives à la suspension du versement des indemnités journalières à la suite d’un contrôle effectué par un médecin à la demande de l’employeur, ainsi que des dispositions concernant l’interdiction de la prescription par télémédecine de certains médicaments en cas de rupture d’approvisionnement.

Concernant la sincérité de la loi de financement de la sécurité sociale, que contestaient les auteurs de l’un des 2 recours, le Conseil constitutionnel rappelle que, aux termes du 2 ° de l’article L.O. 111-3-4 du Code de la sécurité sociale, la loi de financement « détermine, pour l’année à venir, de manière sincère, les conditions générales de l’équilibre financier de la sécurité sociale, compte tenu notamment des conditions économiques générales et de leur évolution prévisible ». Il en résulte que la sincérité de la loi de financement de la sécurité sociale de l’année se caractérise par l’absence d’intention de fausser les grandes lignes de l’équilibre qu’elle détermine.

Il s’ensuit, d’une part, que les prévisions de recettes ainsi que les tableaux d’équilibre par branche doivent être initialement établis par le Gouvernement au regard des informations disponibles à la date du dépôt du projet de loi de financement de la sécurité sociale et des dispositions contenues dans ce projet de loi et, d’autre part, qu’il appartient au Gouvernement d’informer le Parlement, au cours de l’examen de ce projet de loi, lorsque surviennent des circonstances de droit ou de fait de nature à remettre en cause les conditions générales de l’équilibre financier des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et, dans ce cas, de corriger les prévisions initiales.

À cette aune, les Sages relèvent, en premier lieu, que le projet de loi de financement de la sécurité sociale a été fondé, pour l’année 2024, sur des prévisions de croissance du produit intérieur brut de 1,4 % ainsi que sur une hausse des prix à la consommation hors tabac de 2,5 % et une progression de la masse salariale privée de 3,9 %. Dans son avis n° HCFP-2023-8 du 22 septembre 2023 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l’année 2024, le Haut conseil des finances publiques a estimé que la prévision de croissance, « supérieure à celle du consensus des économistes (+ 0,8 %) et des organismes qu’il a auditionnés, est élevée » et a qualifié d’« optimiste » la prévision de déficit public pour 2024 à hauteur de 4,4 points de produit intérieur brut, tout en relevant par ailleurs « les incertitudes importantes qui entourent l’analyse de la situation économique ». Il a, en outre, considéré que les prévisions tenant à l’évolution des prix et à la masse salariale privée étaient « plausibles ». Il ne ressort ni de l’avis du Haut conseil des finances publiques, ni des autres éléments soumis au Conseil constitutionnel, et notamment des prévisions de croissance du produit intérieur brut pour 2024 établies par différentes institutions, que les hypothèses économiques sur lesquelles est fondée la loi de financement de la sécurité sociale sont entachées d’une intention de fausser les grandes lignes de l’équilibre de la loi déférée.

Le Conseil constitutionnel juge en outre que, s’il apparaissait en cours d’année que ces prévisions et les conditions générales de l’équilibre financier des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale étaient remises en cause, il appartiendrait au Gouvernement de soumettre au Parlement les ajustements nécessaires dans une loi de financement de la sécurité sociale rectificative.

En second lieu, les Sages constatent que le rapport figurant en annexe A du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 retrace notamment l’évolution prévisionnelle du solde de la branche maladie pour les années 2023 à 2027 et précise, pour chacune de ces années, les éléments sur lesquels sont fondées ces prévisions. Il ne ressort pas des éléments soumis au Conseil constitutionnel que ces prévisions soient insincères.

Par ces motifs, ce dernier écarte le grief d’insincérité adressé à la loi déférée.

Était également contesté par l’un des 2 recours l’article 63 de la loi déférée modifiant le paragraphe II de l’article L. 315-1 du Code de la sécurité sociale relatif aux conditions dans lesquelles le versement des indemnités journalières peut être suspendu à la suite d’un contrôle effectué par un médecin à la demande de l’employeur.

Ces dispositions prévoient notamment que, lorsque le rapport du médecin diligenté par l’employeur conclut à l’absence de justification de l’arrêt de travail prescrit par le médecin de l’assuré, ou de sa durée, le versement des indemnités journalières est désormais suspendu par l’organisme local d’assurance maladie sans l’intervention préalable du service du contrôle médical.

Les députés requérants reprochaient à ces dispositions, qui suppriment l’intervention systématique du service du contrôle médical de la caisse d’assurance maladie à la suite de ce contrôle, de permettre au médecin diligenté par l’employeur de remettre en cause la justification d’un arrêt de travail prescrit par le médecin de l’assuré, sans avoir à procéder à l’examen médical de ce dernier, et de le priver ainsi du versement d’indemnités journalières. Il en résultait, selon eux, une méconnaissance des exigences découlant du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 ainsi que du « droit à ouverture aux prestations sociales ».

Le Conseil constitutionnel rappelle que, aux termes du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, la Nation « garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence ». Il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, de modifier des textes antérieurs ou d’abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d’autres dispositions, dès lors que, ce faisant, il ne prive pas de garantie légale des exigences constitutionnelles.

À cette aune, les Sages jugent que, en adoptant les dispositions contestées, le législateur a souhaité prévenir les risques d’abus liés à la prescription d’arrêts de travail injustifiés. Il a ainsi entendu poursuivre l’objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude en matière de protection sociale.

Toutefois, les dispositions contestées ont pour effet de priver du versement des indemnités journalières l’assuré social alors même que son incapacité physique de continuer ou de reprendre le travail a été constatée par un médecin qui lui a prescrit un arrêt de travail pour une certaine durée.

Or, en premier lieu, d’une part, si le service du contrôle médical est tenu de procéder à un nouvel examen de la situation de l’assuré lorsque l’arrêt de travail est en lien avec une affection de longue durée, dans tous les autres cas, en revanche, la réalisation d’un nouvel examen est laissée à l’appréciation de ce service au seul vu du rapport établi par le médecin diligenté par l’employeur. En l’absence d’un tel examen, la suspension du versement des indemnités journalières s’applique automatiquement.

D’autre part, si l’assuré a la possibilité de demander à son organisme de prise en charge de saisir le service du contrôle médical, qui est alors tenu de procéder à un nouvel examen de sa situation, cette saisine ne met pas fin à la suspension du versement des indemnités journalières.

En second lieu, l’examen de la situation de l’assuré auquel procède le service du contrôle médical, saisi d’office ou à la demande de l’assuré, peut se limiter à un examen administratif et n’implique pas nécessairement la réalisation d’un nouvel examen médical. Ainsi, la suspension du versement des indemnités journalières peut être maintenue sur le fondement de l’examen médical de l’assuré réalisé par le médecin diligenté par l’employeur ayant conclu à l’absence de justification de l’arrêt de travail prescrit par le médecin de l’assuré.

De l’ensemble de ces motifs, le Conseil constitutionnel déduit que les dispositions contestées méconnaissent les exigences constitutionnelles précitées et les censure.

Était en outre contesté par les auteurs de l’un des 2 recours l’article 72 de la loi déférée prévoyant que, en cas de rupture d’approvisionnement de certains médicaments, le ministre chargé de la santé peut, par arrêté, limiter ou interdire leur prescription par un acte de télémédecine.

Les députés requérants soutenaient que ces dispositions pouvaient avoir pour effet de priver de nombreux patients, lorsqu’ils ne sont pas en mesure de consulter physiquement un médecin, de la possibilité de se voir prescrire un médicament essentiel au regard de leur état de santé. Il en résultait, selon eux, une méconnaissance des exigences découlant du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 et du principe d’égalité devant la loi.

Le Conseil constitutionnel juge que, en adoptant ces dispositions, le législateur a souhaité restreindre les prescriptions par acte de télémédecine de certains médicaments en rupture d’approvisionnement, en vue de réserver la possibilité de prescrire de tels médicaments aux patients ayant fait l’objet d’un examen clinique et d’éviter la constitution de stocks de médicaments à domicile. Ce faisant, il a entendu poursuivre l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé.

Il relève que, toutefois, les dispositions contestées peuvent avoir pour effet de priver un patient de la possibilité de se voir prescrire un médicament nécessaire au regard de son état de santé au seul motif qu’il a consulté un médecin à distance.

Or, la mesure d’interdiction ou de limitation prise par arrêté peut porter sur tout médicament et concerner toute personne, quel que soit son état de santé, et alors même que l’acte de télémédecine serait réalisé par son médecin traitant ou que la personne concernée se trouverait dans l’impossibilité d’obtenir une consultation physique avec un médecin dans un délai compatible avec son état de santé.

Par ces motifs, les Sages jugent que les dispositions contestées méconnaissent les exigences découlant du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 et les déclare contraires à la Constitution.

Par sa décision de ce jour, le Conseil constitutionnel censure, par ailleurs, 8 dispositions de la loi déférée comme « cavaliers sociaux », c'est-à-dire comme ne relevant pas du champ des lois de financement de la sécurité sociale défini par les articles L.O. 111-3-2 à L.O. 111-3-8 du Code de la sécurité sociale.

La censure de ces différentes dispositions ne préjuge pas de la conformité de leur contenu aux autres exigences constitutionnelles. Il est loisible au législateur, s’il le juge utile, d’adopter à nouveau de telles mesures, dont certaines apparaissent au demeurant susceptibles d’être déployées sans attendre son éventuelle intervention.

Enfin, le Conseil constitutionnel censure, d’office, comme contraire au principe de la séparation des pouvoirs, l’article 62 de la loi déférée qui, en imposant de recueillir l’avis des commissions permanentes chargées des affaires sociales de chaque assemblée parlementaire préalablement à l’édiction de certains décrets, entendait faire intervenir une instance législative dans la mise en œuvre du pouvoir réglementaire.