Le prix de la vente d'un fonds de commerce doit être déterminé par les parties ou un tiers, et non par par le juge
Il résulte des que le juge ne peut procéder à la fixation du prix de la vente. Méconnaît ces dispositions l'arrêt qui, pour déterminer le prix de cession d'un fonds de commerce, chiffre lui-même le montant des éléments à retrancher du chiffre d'affaires annuel, sur lequel les parties étaient en désaccord.
Une promesse de cession de fonds de commerce sous conditions suspensives est conclue, le 7 septembre 2015, entre deux sociétés. Cette promesse prévoit que le prix de cession est fixé à 80 % du chiffre d'affaires annuel de référence, défini comme celui des douze derniers mois d'exploitation antérieurs à l'antépénultième mois précédant la cession, dont devaient être retranchés divers éléments. Il est par ailleurs prévu le recours à un tiers évaluateur, qualifié d' « expert », à la fois en cas de désaccord des parties sur le bilan dont était extrait le chiffre d'affaires et en cas de désaccord sur la détermination du prix définitif. Dans cette dernière hypothèse, à défaut d'accord des parties sur l'identité de l'expert à désigner ou si l'expert désigné n'avait pas rempli sa mission dans un délai de six mois, cet « expert » devait être désigné par le président du tribunal de commerce saisi par la partie la plus diligente.
Le 31 mars 2016, les parties signent l'acte définitif de cession. Les comptes de l'année 2015 n'étant pas arrêtés à cette date, un prix provisoire est fixé, le prix définitif devant être fixé après la communication du chiffre d'affaires de référence.
Après communication des données comptables, un désaccord survient entre les parties sur le chiffre d'affaires de l'année 2015. Conformément aux stipulations contractuelles, les parties désignent d'un commun accord un « expert » qui procède à l'évaluation du chiffre d'affaires total annuel.
Les parties étant également en désaccord sur le montant des retraitements à effectuer, la société cédante assigne devant le tribunal de commerce la société cessionnaire afin de solliciter, à titre principal, la fixation définitive du prix et la condamnation du cessionnaire à lui payer le solde lui restant dû et, à titre subsidiaire, une expertise judiciaire pour fixer le prix définitif par application du mécanisme de calcul stipulé au contrat.
Pour dire la vente arrêtée au prix de 1 035 820 euros et rejeter l'ensemble des demandes de la société cédante, la cour d'appel, après avoir relevé que l' « expert » désigné d'un commun accord par les parties, conformément au contrat, avait fixé le chiffre d'affaires annuel à la somme de 1 471 682 euros, procède au retraitement de cette somme en déduisant notamment, ainsi que le prévoit l'acte de vente, les ventes hors comptoir, qu'il évalue à la somme de 53 000 euros, pour aboutir à un prix de vente de 1 297 347 euros.
La Cour de cassation désavoue les juges du fond. La cour d'appel a violé les articles 1591 (le prix de la vente doit être déterminé et désigné par les parties) et 1592 (il peut cependant être laissé à l'estimation d'un tiers) du Code civil, dont il résulte que le juge ne peut procéder à la fixation du prix de la vente.
Dès lors, le tribunal ne pouvait chiffrer lui-même, pour déterminer le prix de cession, le montant des éléments à retrancher du chiffre d'affaires annuel, montant sur lequel les parties étaient en désaccord.