L’appelant ne peut être condamné à des dommages-intérêts à raison d'un passage ou extrait de ses écritures remises à la cour d'appel
Tels qu'éclairés par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, les
Ainsi en a jugé la
En l’espèce, une banque a fait pratiquer, en vertu d’un acte de prêt notarié, une saisie-attribution sur le compte bancaire d’un couple marié qui a contesté cette saisie devant un juge de l’exécution.
Celui-ci a débouté les débiteurs de leurs demandes, a validé la saisie litigieuse, et les a condamnés à payer à la banque une certaine somme à titre de dommages-intérêts.
La cour d’appel a confirmé ce jugement, et un pourvoi en cassation a été formé.
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la cour d’appel au visa des articles 6, § 1, et 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, , et .
• En premier lieu, elle revient sur l’exigence d’impartialité du juge, issue de l’article 6, § 1, précité. Elle fait état de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) qui distingue entre une démarche subjective, essayant de déterminer ce que tel juge pensait dans son for intérieur ou quel était son intérêt dans une affaire particulière, et une démarche objective, amenant à rechercher s’il offrait des garanties suffisantes pour exclure à cet égard tout doute légitime (
Dans l'affaire jugée, la cour d’appel a retenu que les débiteurs se sont soigneusement abstenus d'engager une procédure d'inscription de faux à l'encontre du procès-verbal de dénonciation qui leur a été délivré. Selon elle, par ailleurs, une procédure engagée par leur adversaire n'aurait fait que tourner à leur confusion et aurait pu entraîner de nouveaux frais à leur charge de sorte qu'ils devraient se féliciter de ne pas avoir fait l'objet d'une assignation en la matière.
La Cour de cassation juge qu’en statuant ainsi, « en analysant, dans les motifs de l'arrêt, les thèses des parties selon des modalités différentes, celle de la banque étant présentée avec neutralité, celle des débiteurs étant ponctuée d'expressions révélant une appréciation subjective de leur cause et traduisant des jugements de valeur, une telle présentation étant de nature à faire peser un doute légitime sur l'impartialité de la juridiction, la cour d'appel a violé le texte susvisé ».
• En second lieu, il s’agissait pour la Haute juridiction de déterminer si une partie appelante peut être condamnée à des dommages-intérêts sur les fondements de l’ et à raison du contenu de ses écritures produites devant la cour d’appel.
Après avoir rappelé la teneur des articles 6, § 1, 10, § 1 et § 2, de la
Pour les juges du droit, « il en résulte qu'éclairés par la jurisprudence de la Cour européenne, les articles 6 et 10 de la CEDH s'opposent, au regard des impératifs de libre exercice des droits de la défense et de droit à un procès équitable, à ce qu'une partie appelante d'un jugement soit condamnée, sur le fondement des et , à des dommages-intérêts à raison d'un passage ou d'un extrait de ses écritures remises à la cour d'appel ».
En effet, seules les dispositions spéciales prévues à l'
Une telle interprétation, si elle n'a pas été affirmée antérieurement par la deuxième chambre civile, est conforme aux articles 6 et 10 de la Convention EDH.
En l'espèce, pour condamner les débiteurs à payer à la banque une certaine sommes à titre de dommages-intérêts, la cour d’appel, qui n’était pas saisie d’une demande de l’intimée sur le fondement de l’article 41 précité, avait retenu essentiellement que la mauvaise foi des appelants était patente ; ils n’ont pas craint dans leurs écritures de reprocher des malversations à la banque qu’ils accusaient pratiquement d’escroquerie ; un tel comportement constitue à l’évidence un abus fautif, de nature à causer un préjudice à la partie intimée, l’abus déjà constaté par le juge de l’exécution ayant été aggravé par la procédure d’appel et le contenu de l’argumentation malveillante des débiteurs.
En statuant ainsi, alors que les appelants ne pouvaient être condamnés à des dommages-intérêts sur le fondement des articles 1240 et 559 précités, à raison d’un passage ou d’un extrait de leurs conclusions devant la cour d’appel, fussent-ils de nature à heurter et choquer, la cour d’appel a violé les textes et principes susvisés.