[09.10.2023]
Par un arrêt en date du 5 octobre 2023, la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence, jugeant désormais que la régularisation de la fin de non-recevoir tirée de la saisine d'une juridiction incompétente est possible si, au jour où elle intervient, dans le délai d'appel interrompu par une première déclaration d'appel formée devant une juridiction incompétente, aucune décision définitive d'irrecevabilité n'est intervenue.
En l’espèce, le 20 novembre 2018, un justiciable relève appel d’un jugement d’un conseil des prud’hommes du 7 septembre 2018, notifié le 22 octobre 2018, devant la cour d’appel de Paris, territorialement incompétente. Le 18 décembre 2018, il relève appel du même jugement devant la cour d'appel de Versailles territorialement compétente.
Par un arrêt rendu le 11 octobre 2019, la cour d’appel de Paris confirme l’ordonnance du 3 avril 2019 d’un conseiller de la mise en état ayant déclaré le l’appel irrecevable. La société soulève, devant le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Versailles, l'irrecevabilité de l'appel relevé le 18 décembre 2018. À la suite de quoi, le 10 juin 2021, la cour d’appel de Versailles confirme l’ordonnance l’ayant jugé irrecevable.
Un pourvoi en cassation est formé.
Le juge du droit annule l’arrêt attaqué au visa des et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour la Cour, « il résulte [du premier de ces textes], interprété à la lumière [du second], que la régularisation de la fin de non-recevoir tirée de la saisine d'une juridiction incompétente est possible si, au jour où elle intervient, dans le délai d'appel interrompu par une première déclaration d'appel formée devant une juridiction incompétente, aucune décision définitive d'irrecevabilité n'est intervenue ».
Il s’agit là d’un revirement de jurisprudence dont la Haute juridiction explique la finalité : « seule cette interprétation est de nature à donner son plein effet à la faculté offerte à l'appelant de régulariser la fin de non-recevoir en rendant effective l'interruption du délai d'appel résultant de l'application de l' ».
Jusqu’à cette décision, la Cour de cassation jugeait que l’interruption du délai d’appel était non avenue lorsque l’appel était définitivement rejeté par un moyen de fond ou par une fin de non-recevoir, ce qui aboutissait à faire rétroagir une décision d’irrecevabilité rendue postérieurement au second appel formé devant la juridiction compétente.