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Offert

La demande d'enregistrement d'un signe à titre de marque ne constitue pas un acte de contrefaçon

Jurisprudence

Dans un arrêt du 13 octobre 2021, la chambre commerciale de la Cour de cassation opère un revirement de sa jurisprudence, à la lumière de la celle de la Cour de justice de 2016, pour dire que la demande d'enregistrement d'un signe à titre de marque ne constitue pas un acte de contrefaçon dans la mesure où elle ne caractérise pas [encore] un usage pour des produits ou des services, en l'absence de tout début de commercialisation, et ne cause aucun risque de confusion dans l'esprit du public et, par conséquent, aucune atteinte à la fonction essentielle d'indication d'origine de la marque.

Faits et procédure. - La société Domaine [U] [M] fut acquise par la société Wolfberger suite à sa liquidation judiciaire en 2012 avec ses éléments incorporels, le nom commercial et l'enseigne « [U] [M] » ainsi que plusieurs marques désignant des produits en classes 32 et 33.

Après la liquidation de cette société Domaine [U] [M], M. [G] [M], son ancien dirigeant, et Mmes [V] et [D] [M], les filles de ce dernier, ont constitué trois sociétés :

- la société [G] [M] SARL, devenue Les Tulipes blanches,
la société [D] et [V] [M] SAS, devenue [D] et [V] [M]- [L],
et la société Domaine [D] et [V] [M]- [L] SCEA.

En décembre 2012, M. [G] [M] a, pour le compte de la société [G] [M], déposé en tant que marques les signes « [G] [M] », « [D] [M] Grands Vins d'Alsace [D] [M] [W] [D] [M] [W] [D] et [V] », « [V] [M] » et « Le Weid de [G] [M] ». En mars 2013, Mme [V] [M] a déposé les signes « Famille [M] » et « [V] [M] ». En mai 2013, Mme [D] [M] a déposé les signes « [D] et [V] [M] ». Toutes ces marques étaient déposées pour des produits en classe 32 ou 33, mais refusées par l'INPI.

La société Wolfberger a assigné M. [G] [M], Mme [V] [M], Mme [D] [M], la société [D] et [V] [M]- [L], la société Les Tulipes blanches et la société Domaine [D] et [V] [M]- [L] pour contrefaçon de ses marques et concurrence déloyale, ce à quoi ces dernières ont répondu par une demande reconventionnelle concurrence déloyale, notamment pour s'être appropriée l'histoire familiale de la famille [M].

Demande d'enregistrement non constitutif d'un acte de contrefaçon. - L'apport principal de l'arrêt, doublé dans un autre arrêt du même jour et de la même chambre, non publié (Cass. com., 13 oct. 2021, n° 19-20.959, Sté Compagnie méditerranéenne des cafés c/ Sté Cafés Richard et a.) consiste en le revirement de l'interprétation de la Cour de cassation des articles L. 713-2, L. 713-3 et L. 716-1 du Code de la propriété intellectuelle, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019 transposant le « paquet marque » en droit français.

En effet, la Cour de cassation avait pu retenir à plusieurs reprises que le dépôt à titre de marque d'un signe contrefaisant constitue à lui seul un acte de contrefaçon, indépendamment de son exploitation (V. not. la jurisprudence citée : Cass. com., 26 nov. 2003, n° 01-11.784 : JurisData n° 2003-021296 ; PIBD 2004, III, p. 98. - Cass. com., 10 juill. 2007, n° 05-18.571 : JurisData n° 2007-040140 ; D. 2007, p. 2112, obs. J. Daleau. - Cass. com., 21 févr. 2012, n° 11-11.752 : JurisData n° 2012-003329. - Cass. com., 24 mai 2016, n° 14-17.533 : JurisData n° 2016-010185 ; PIBD 2016, n° 1054, III, p. 633 ; Propr. intell. 2016, n° 60, p. 357 et 367, J. Canlorbe ; Dalloz IP/IT 2016/11, p. 556, N. Martial-Braz. – V. également JCl. Marques – Dessins et modèles, Fasc. 7513, Contrefaçon de marque, J. Canlorbe, n° 134 à 136).

Or, le 13 octobre la Haute Juridiction reconsidère sa position à la lumière de l'arrêt Daimler de la Cour de justice, plus de 5 ans après sa publication (CJUE, 3 mars 2016, aff. C-179/15, Daimler AG : JurisData n° 2016-004664 ; Propr. industr. 2016, comm. 26, A. Folliard-Monguiral), selon lequel « le titulaire d'une marque enregistrée ne peut interdire l'usage par un tiers d'un signe similaire à sa marque que si cet usage a lieu dans la vie des affaires, est fait sans le consentement du titulaire de la marque, est fait pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque a été enregistrée et, en raison de l'existence d'un risque de confusion dans l'esprit du public, porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte à la fonction essentielle de la marque qui est de garantir aux consommateurs la provenance du produit ou du service ».

La Cour de cassation en tire les conséquences pour dire que la demande d'enregistrement d'un signe en tant que marque ne peut caractériser un usage pour des produits ou des services en l'absence de tout début de commercialisation de produits ou services sous le signe et, par conséquent, de tout risque de confusion dans l'esprit du public susceptible de porter atteinte à la fonction essentielle d'indication d'origine de la marque.

La chambre commerciale donne quelques réponses aux autres moyens soulevés, notamment :

Interdiction d'utilisation par un tiers de son nom patronymique : En application de l'ancien article L. 713-6 CPI applicable en l'espèce, le titulaire d'une marque ne peut obtenir que l'utilisation par un tiers de son nom soit interdite ou limitée que si ce dernier a commis un acte de contrefaçon de la marque ou qu'il existe des raisons sérieuses de penser qu'il s'apprête à en commettre un.

Usage du nom de famille, élément distinctif déterminant, seul ou en combinaison avec des prénoms : bien que le terme « [M] » ne soit pas exactement la marque détenue par la demanderesse mais une partie déterminante de cette marque, son usage en combinaison avec d'autres prénoms « [D] et [V] » n'est pas suffisant pour écarter la qualification de contrefaçon.

Distinction des fondements contrefaçon/concurrence déloyale : Le rejet de la demande de la société Wolfberger en paiement de dommages-intérêts pour concurrence déloyale pour cause de double emploi des mêmes faits, déjà reconnus comme contrefaisants, n'est pas motivé dans la mesure où la demanderesse poursuivait non pas les emplois per se du patronyme [M] mais bien la multiplication, par les consorts [M], de dépôts de marques comportant le patronyme « [M] ».

Absence de mention de la cession de la société dans la communication de la défenderesse : Au visa de l'article 1382 ancien, devenu 1240, du Code civil imposant la réparation du dommage causé à autrui en abstraction de la bonne ou mauvaise foi du fautif, la Cour de cassation retient que la cour d'appel n'avait pas suffisamment motivé son refus de la demande de la société Wolfberger en dommages-intérêts pour concurrence déloyale qui serait constitutive par la communication commerciale par les consorts [M] sur l'histoire de leur famille sans mentionner la cession du fonds de commerce, laquelle communication pourrait résulter en un risque de confusion entre les produits commercialisés sous la marque « [U] [M] » et ceux commercialisés par les consorts [M].

Exploitation par l'acquéreur d'un fonds de commerce familial de l'histoire de la famille : la chambre commerciale casse également le point retenant la concurrence déloyale commise par la société Wolfberger en ce qu'elle chercherait à profiter indûment des efforts intellectuels et techniques des sociétés de la famille [M] en s'appropriant son histoire. En effet, l'acquéreur d'un fonds de commerce familial est en droit d'exploiter l'histoire de la société, qui inclue nécessairement des éléments intellectuels liés à l'histoire de la famille, tant qu'il ne crée pas de risque de confusion entre son activité et celle des membres de la famille qui restent actifs dans le même domaine.