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La CJUE ne soumet pas à l'exigence d'indépendance l'autorité judiciaire d'émission d'une décision d'enquête européenne

Jurisprudence

La CJUE, dans un arrêt de grande chambre du 8 décembre 2020, refuse de transposer sa jurisprudence récente sur l'indépendance du ministère public qui émet un mandat d'arrêt européen (MAE) à l'autorité judiciaire qui émet une décision d'enquête européenne (DEE). Cette décision peut être adoptée par le parquet d'un État membre susceptible de ne pas être indépendant du pouvoir exécutif. Les droits fondamentaux de la personne concernée par la décision d'enquête européenne sont suffisamment protégés tant au stade de son émission qu'à celui de son exécution dans un autre État membre. Les termes « autorité judiciaire » ne doivent pas nécessairement être interprétés de la même manière dans chaque instrument de coopération judiciaire en matière pénale.

Une juridiction autrichienne a demandé à la CJUE si le parquet d'un État membre peut être considéré comme une « autorité judiciaire », au sens de la directive sur la décision d'enquête européenne (DEE), compétente pour émettre une décision d'enquête européenne, bien qu'il soit exposé à un risque d'être soumis à des instructions ou à des ordres individuels de la part du pouvoir exécutif dans le cadre de l'adoption d'une telle décision. En d'autres termes, la jurisprudence relative à l'indépendance du ministère public dans le cadre des mandats d'arrêt européens (MAE) peut-elle être transposée aux décisions d'enquête européennes ?

Le ministère public allemand a pris une décision d'enquête européenne. La juridiction autrichienne saisie constate que, en application du droit judiciaire allemand, le ministère public peut recevoir des instructions, y compris dans des cas individuels, du pouvoir exécutif. Elle se demande si cette DEE doit être exécutée par les autorités autrichiennes.

La DEE est une décision judiciaire qui a été émise ou validée par une autorité judiciaire d'un État membre (État d'émission) afin de faire exécuter une ou plusieurs mesures d'enquêtes spécifiques dans un autre État membre (État d'exécution) en vue d'obtenir des preuves. La directive relative à la DEE prévoit que les autorités judiciaires d'émission ne peuvent être qu'un juge, une juridiction, un juge d'instruction ou un procureur compétent dans l'affaire concernée. Cette directive cite spécifiquement le procureur parmi les autorités judiciaires d'émission d'une DEE. Donc jusqu'à présent, il ne faisait aucun doute que cette mention permettait aux procureurs compétents selon leur législation nationale, d'émettre directement des demandes de DEE. Les doutes de la juridiction de renvoi trouvent leur origine dans l'arrêt OG et PI : comme la Cour a déclaré, dans cet arrêt, que le ministère public allemand ne réunissait pas les marques d'indépendance indispensables à la délivrance d'un MAE, la juridiction de renvoi se demande s'il ne les réunit pas non plus aux fins de l'émission d'une DEE, et ce dans la mesure où il n'aurait pas le statut d'autorité judiciaire indépendante (CJUE, gr. ch., 27 mai 2019, aff. C-508/18 et C-82/19, OG et PI ; V. Mandats d'arrêt européens : la CJUE précise la notion d' « autorité judiciaire d'émission »).

La Cour juge que les notions d'autorité judiciaire et d'autorité d'émission, au sens de la directive sur la DEE, englobent le parquet d'un État membre. Et ce, quand bien même ils seraient soumis à un rapport de subordination légale à l'égard du pouvoir exécutif de cet État membre. Pour aboutir à cette conclusion, elle fait une comparaison de la décision-cadre relative au MAE (Cons. UE, décision-cadre 2002/584/JAI, 13 juin 2002) et la directive relative à la DEE (PE et Cons. UE, dir. 2014/41/UE, 3 avr. 2014).

  • Désignation des autorités d'émission

La Cour relève d'abord que :
- d'après cette directive, une DEE ne peut être exécutée que si l'autorité qui l'a émise est une « autorité d'émission » ;
- lorsqu'une telle décision est émise par une autorité d'émission autre qu'un juge, une juridiction, un juge d'instruction ou un procureur compétent dans l'affaire concernée, elle doit être validée par une « autorité judiciaire » avant d'être transmise aux fins de son exécution dans un autre État membre.

À la différence de ce qui est prévu dans la décision-cadre relative au MAE (qui se réfère à l'autorité judiciaire d'émission sans préciser l'identité des autorités couvertes par cette notion), la Cour constate que dans la directive sur la DEE :
- le procureur figure expressément parmi les autorités comprises comme étant une autorité d'émission ;
- le procureur figure également parmi les autorités judiciaires habilitées à valider une DEE avant sa transmission à l'autorité d'exécution, dans le cas où cette décision a été émise par une autorité d'émission autre qu'un juge, une juridiction, un juge d'instruction ou un procureur compétent, dans l'affaire concernée ;
- la qualification du procureur en tant qu'autorité d'émission ou d'autorité judiciaire n'est pas subordonnée à l'absence de rapport de subordination légale de celui-ci à l'égard du pouvoir exécutif de l'État membre dont il relève.

  • Garantie des droits du suspect ou de la personne poursuivie

La Cour souligne que l'émission ou la validation d'une DEE est soumise à une procédure et à des garanties distinctes de celles qui encadrent l'émission d'un MAE :
- en vertu de la directive sur la DEE, le procureur qui émet ou valide une telle décision doit prendre en compte le principe de proportionnalité et les droits fondamentaux de la personne concernée et sa décision doit pouvoir faire l'objet d'un recours effectif au moins équivalent à celui ouvert dans le cadre d'une procédure nationale similaire ;
- la directive offre la possibilité à l'autorité d'exécution, et plus largement à l'État d'exécution, de veiller, par différents mécanismes, au respect de principe et des droits fondamentaux de la personne concernée.
Ainsi, tant au stade de l'émission ou de la validation que de l'exécution de la décision d'enquête européenne, la directive contient un ensemble de garanties qui permettent d'assurer la protection des droits fondamentaux de la personne.

  • Objectifs poursuivis par les textes

Enfin, la Cour relève que l'objectif poursuivi par une DEE se distingue de celui poursuivi par un MAE :
- le MAE vise l'arrestation et la remise d'une personne recherchée pour l'exercice de poursuites pénales ou pour l'exécution d'une peine privative de liberté ;
- une DEE vise à faire exécuter une ou plusieurs mesures d'enquête spécifique en vue d'obtenir des preuves.
Ainsi, même si certaines de ces mesures d'enquête peuvent être intrusives, une décision d'enquête européenne n'est pas, à la différence du MAE, de nature à porter atteinte au droit à la liberté de la personne concernée.

Étant donné l'ensemble de ces différences, la jurisprudence récente selon laquelle la notion d'autorité judiciaire d'émission au sens de la décision-cadre, ne couvre pas les parquets européens d'un État membre qui sont exposés au risque d'être soumis à des instructions individuelles provenant du pouvoir exécutif, n'est pas applicable dans le contexte de la directive sur la DEE.