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Accords de report d'entrée (« pay for delay ») : la CJUE confirme la condamnation des laboratoires Lundbeck, Arrow, Merck, Xellia Pharmaceuticals et Alpharma

Jurisprudence

La CJUE, dans 5 arrêts rendus le 25 mars 2021, rejette les pourvois de plusieurs fabricants de médicaments impliqués dans l'entente visant à retarder la commercialisation du générique de l'antidépresseur Citalopram. La Commission européenne avait prononcé à leur égard des amendes de près de 150 M€.

Ces affaires s'inscrivent dans le contexte de l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt du 30 janvier 2020, Generics (UK) e.a. (CJUE, 30 janv. 2020, aff. C-307/18, Generics (UK) e.a. ; V. Brevet pharmaceutique : un règlement amiable des litiges portant sur le report de l'entrée sur le marché est constitutif de pratiques anticoncurrentielles), dans lequel la Cour a dégagé les critères pour qu'un accord de règlement amiable d'un litige opposant le titulaire d'un brevet pharmaceutique à un fabricant de médicaments génériques soit contraire au droit de la concurrence de l'Union, et des affaires dites « Servier », actuellement pendantes devant la Cour, dans lesquelles la Commission a constaté que des accords de règlement amiable de litiges de brevets constituaient des infractions au droit de la concurrence de l'Union.

À partir des années 70, un laboratoire pharmaceutique danois a développé et fait breveter un médicament antidépresseur contenant la substance active dénommée Citalopram. À l'expiration de son brevet de base sur cette molécule, le laboratoire ne détenait plus qu'un certain nombre de brevets secondaires lui apportant une protection plus limitée. Des fabricants de versions génériques de cette molécule pouvaient donc envisager d'entrer sur le marché.

En 2002, le laboratoire danois a conclu des accords avec des entreprises actives dans la production ou dans la vente de génériques. En contrepartie de l'engagement des entreprises de ne pas entrer sur le marché, le laboratoire leur a accordé des paiements importants et a notamment acheté leurs stocks de produits génériques.

La Commission européenne a été informée par l'autorité danoise de la concurrence de l'existence de ces accords. La Commission a considéré que le laboratoire et les entreprises étaient des concurrents, au moins potentiels, et que les accords constituaient des restrictions de la concurrence « par objet ». Les sommes versées par le laboratoire en vue d'empêcher ces producteurs d'entrer sur le marché du Citalopram correspondaient plus ou moins aux profits qu'ils auraient pu réaliser s'ils étaient entrés avec succès sur le marché. Elle a infligé une amende de 93,7 M€ au laboratoire et une amende de 52,2 M€ aux producteurs. Le Tribunal a rejeté leurs recours.

Ces entreprises ont formé des pourvois devant la CJUE, demandant l'annulation des arrêts du Tribunal et de la Commission, ce que la Cour refuse de faire.

  • Sur l'existence d'un rapport de concurrence potentielle entre le laboratoire et les fabricants

La Cour considère que le Tribunal n'a pas commis d'erreur manifeste en confirmant qu'au moment de la conclusion des accords, le laboratoire et les fabricants de génériques se trouvaient dans un rapport de concurrence potentielle. Pour apprécier l'existence d'un rapport de concurrence potentielle, elle juge qu'il faut déterminer s'il existe des possibilités réelles et concrètes qu'une entreprise absente d'un marché intègre ce marché et concurrence les entreprises déjà présentes. Ce critère ne requiert nullement qu'il soit démontré avec certitude que l'entreprise entrera effectivement sur le marché concerné, et plus encore, qu'elle sera en mesure, par la suite, de s'y maintenir.

Concernant plus particulièrement des accords intervenus dans le contexte de l'ouverture du marché d'un médicament contenant un principe actif récemment tombé dans le domaine public, il convient d'établir si le fabricant de médicaments génériques a effectivement la détermination ferme ainsi que la capacité propre d'entrer sur le marché et ne se heurte pas à des barrières présentant un caractère insurmontable. S'agissant en particulier de l'appréciation de l'existence sur le marché concerné des barrières à l'entrée présentant un caractère insurmontable, la Cour rappelle que l'existence d'un brevet qui protège le procédé de fabrication d'un principe actif tombé dans le domaine public ne saurait, en tant que telle, être regardée comme une telle barrière insurmontable.

Ainsi, l'existence de ce brevet ne peut pas, en tant que telle, empêcher de qualifier de concurrent potentiel du fabricant du médicament princeps concerné un fabricant de médicaments génériques qui a la détermination ferme ainsi que la capacité propre d'entrer sur le marché. Et qui, par ses démarches, se montrer prêt à contester la validité de ce brevet et à assumer le risque d'être confronté, lors de son entrée sur le marché, à une action en contrefaçon introduite par le titulaire de ce brevet. La Cour précise qu'il n'appartient pas à l'autorité de concurrence concernée de procéder à un examen de la force du brevet en cause ou de la probité qu'un litige entre son titulaire et un fabricant de médicaments génériques puisse aboutir au constat que ce brevet est valide ou contrefait.

  • Sur la qualification de restrictions de concurrence « par objet »

La qualification de « restriction par objet » doit être retenue lorsqu'il ressort de l'examen des accords de règlement amiable concernés que les transferts de valeurs du fabricant de médicaments princeps au profit du fabricant de médicaments génériques s'expliquent uniquement par l'intérêt commercial commun des parties à ne pas se livrer à une concurrence par les mérites.

Il convient, dans chaque cas d'espèce, d'apprécier si le solde positif net de ces transferts de valeurs était suffisamment important pour inciter effectivement les fabricants de médicaments génériques à renoncer à entrer sur le marché concerné et à ne pas concurrencer par ses mérites le fabricant de médicaments princeps. Il n'est pas requis que ce solde positif net soit nécessairement supérieur aux bénéfices que ce fabricant de médicaments génériques aurait réalisés s'il avait obtenu gain de cause dans la procédure en matière de brevets.

De plus, la Cour précise que, tout comme s'agissant de l'appréciation de l'existence d'un éventuel rapport de concurrence potentielle, l'appréciation de la force des brevets de procédé en cause comme des chances de succès de l'une ou l'autre des parties à l'accord de règlement amiable concerné n'est pas pertinente aux fins de la qualification de « restriction par objet » de ces accords, dès lors que les transferts de valeurs sont suffisamment importants.

Elle ajoute qu'il n'est pas forcément nécessaire que le même type d'accords que les accords litigieux aient déjà été condamnés par la Commission pour que ceux-ci puissent être considérés comme restrictifs de la concurrence « par objet », et ce alors même qu'ils interviennent dans un domaine spécifique tel que celui des droits de la propriété intellectuelle.

Selon la Cour, pour qualifier de « restriction par objet » un accord donné, seules importent les caractéristiques propres de celui-ci dont doit être déduite l'éventuelle nocivité pour la concurrence, au besoin à l'issue d'une analyse détaillée de cet accord, de ses objectifs et du contexte économique et juridique dans lequel il s'insère.

La Cour conclut que les accords litigieux qui ont permis de retarder l'entrée sur le marché des fabricants de médicaments génériques et qui étaient assortis de paiements effectués par le laboratoire, lesquels, par leur importance, ont incité les fabricants de médicaments génériques à ne pas poursuivre leurs efforts pour entrer sur le marché, appartiennent à cette catégorie de pratiques revêtant une nocivité particulière pour la concurrence.

  • Obligation de diligence issue d'une jurisprudence qui n'est pas applicable à la situation dans laquelle se trouvaient deux des entreprises

Le Tribunal a jugé que ces deux fabricants de génériques ne pouvaient invoquer la violation de leurs droits de la défense en raison de la durée prétendument déraisonnable de la procédure administrative, à défaut d'avoir satisfait à leur devoir de diligence qui aurait dû les conduire dès 2003, à conserver tous documents utiles à leur défense.

Or, en opposant cette obligation dès 2003 alors que la procédure administrative ne fut ouverte à l'égard des deux entreprises qu'au début des années 2010, le Tribunal a commis une erreur de droit.

La Cour n'annule toutefois pas la décision. En effet, si le motif d'une décision révèle une violation du droit de l'UE mais que le dispositif apparaît fondé pour d'autres motifs de droit, la CJUE peut procéder à une substitution de motifs.

À ce titre, elle relève que ces sociétés étaient, eu égard à l'ouverture par la Commission dès 2008, d'une enquête sectorielle dans le domaine des médicaments génériques, tenues à un devoir spécifique de prudence. Ce devoir de prudence leur imposait de veiller à la bonne conservation, dans leurs archives, des éléments permettant de retracer leur activité, afin de disposer de preuves nécessaires dans l'hypothèse d'actions administratives ou judiciaires à la suite d'une enquête sectorielle.