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Réguler les plateformes numériques de travail : les préconisations du rapport Frouin

Jean-Yves Frouin, ancien président de la chambre sociale de la Cour de cassation, a remis le 2 décembre 2020 au Premier ministre son rapport intitulé : « Réguler les plateformes numériques de travail ».
Assisté d'un comité d'experts, il s'était vu confier, en janvier puis en juin 2020, la mission de formuler des propositions en matière de statut, de dialogue social et de droits sociaux liés aux plateformes numériques de travail. Objectif affiché dans les lettres de mission successives : sécuriser les relations juridiques et les travailleurs sans remettre en cause la flexibilité apportée par le statut d'indépendant.

Comprenant 156 pages, le rapport articule ses recommandations autour de 5 axes :

1. Clarifier le statut des travailleurs des plateformes ;

2. Garantir les droits des travailleurs et sécuriser les relations par le recours à un tiers ;

3. Assurer une régulation collective des plateformes s'appuyant sur des représentants légitimes des travailleurs ;

4. Réglementer et contrôler les plateformes numériques de travail ;

5. Compléter les fondations d'un « statut commun » pour toutes les formes de travail.

Le rapport va désormais être transmis aux partenaires sociaux et sera un des éléments qui permettra de nourrir la concertation dans le cadre de l'agenda social sur les formes particulières d'emploi sous le pilotage du ministère du Travail, de l'Emploi et de l'Insertion en association avec les ministères de l'Économie, des Finances et de la Relance et de la Transition écologique.
À la demande du Premier ministre, Jean Yves Frouin présentera son rapport lors de l'ouverture de la concertation sur ce sujetd'ici fin décembre.

1. Clarifier le statut des travailleurs des plateformes

Le rapport s'attache tout d'abord à analyser les trois hypothèses de statut possibles actuellement pour caractériser la relation de travail entre les plateformes numériques et les travailleurs à leur service : le statut de salarié, de travailleur indépendant ou le tiers-statut. Il écarte d'emblée la solution du tiers-statut entre celui de salarié et d'indépendant qui a été avancée par certaines organisations. Cette option, selon le rapporteur « risquerait de remplacer une frontière floue par deux frontières qui le seraient tout autant et le contentieux en requalification ne s'éteindrait pas ».

S'agissant du statut de salarié, le rapport admet que sa reconnaissance à tous les travailleurs des plateformes « aurait pour avantage de régler immédiatement les questions de sécurité juridique en éteignant les contentieux en requalification » et permettrait d'étendre aux travailleurs des plateformes les droits et protections des salariés. Mais cette option « techniquement aisée à mettre en œuvre » est écartée ne rentrant pas dans l'hypothèse de travail des pouvoirs publics ayant initié la mission. Le seul argument techniquement recevable selon le rapport pour l'écarter serait celui de l'autonomie dans l'exercice du travail sur les plateformes.

Reste le statu quo : le maintien alors du statut de travailleur indépendant. Toutefois, même doté de certains des droits applicables aux salariés, il est reconnu fragile puisqu'il peut à tout moment être requalifié par le juge. Le rapport préconise alors d'assurer une sécurisation juridique de la relation de travail en faisant disparaître les indices d'un lien de subordination : donner les moyens au travailleur de se constituer sa propre clientèle, de fixer ses tarifs et les conditions d'exécution de sa prestation.

Il pourrait également être précisé dans le Code du travail dans le champ d'application du titre consacré aux travailleurs utilisant une plateforme, une définition légale du travailleur indépendant reposant sur la réunion de plusieurs critères (V. Rapp. Annexe 4).

2. Garantir les droits des travailleurs et sécuriser les relations par le recours à un tiers

S'inspirant de six rapports et études ayant avancé cette solution, le rapport formule une proposition de compromis, qui consiste à généraliser le recours par les travailleurs des plateformes à un tiers pour les salarier. Ce tiers serait des entreprises de portage salarial ou des coopératives d'emploi et d'activité, « mais d'autres véhicules juridiques sont également possibles ». Le travailleur sur plateforme serait alors salarié par ce tiers et aurait tous les droits et avantages liés au salariat sans pour autant être privé de la flexibilité et de l'autonomie dans son travail. Cette « indépendance protégée » serait de nature à satisfaire l'ensemble des objectifs poursuivis. Le rapport préconise certaines conditions d'application. Les chauffeurs VTC exerçant depuis moins de 12 mois, les livreurs à vélo exerçant depuis moins de 6 mois et tous ceux exerçant moins d'un mi-temps, continueraient comme aujourd'hui, sans aucune contrainte supplémentaire. En revanche, les plus engagés dans leur activité, exerçant depuis 6 à 12 mois à mi-temps ou davantage, auraient l'obligation de s'intégrer à un tiers pour bénéficier des garanties du salariat. Le seul inconvénient de ce mécanisme selon le rapport serait le surcoût de la contribution à payer à la coopérative ou à la société de portage. Le présent rapport propose d'en répartir la charge entre le travailleur et la plateforme (rétrocession de 20 ou 25 % de commission) et en prévoyant également un avantage fiscal pour le travailleur. Le législateur pourrait intervenir en ce sens.

Le rapport reconnaît que cette solution ne règle pas automatiquement la situation des travailleurs de passage dans l'activité même si rien ne les empêche de s'affilier à un tiers pour bénéficier des garanties du salariat. Le rapport esquisse des pistes complémentaires pour cette catégorie de travailleurs non (encore) concernés par l'obligation de sécurisation.

3. Assurer une régulation collective des plateformes s'appuyant sur des représentants légitimes des travailleurs

Le rapport prône un dialogue social organisant de manière négociée des règles communes, de manière à rééquilibrer les relations contractuelles et à réduire l'asymétrie de pouvoirs entre plateformes numériques et travailleurs. Il s'oriente vers un système d'accords collectifs avec détermination préalable de représentants. Le niveau de la négociation collective serait celui du secteur d'activité (branche) et, à titre subsidiaire, celui de la plateforme. Il propose une représentation des travailleurs fondée sur des élections dans chaque plateforme avec une agrégation des résultats au niveau du secteur, après une période d'expérimentation. Le rapport recommande un déplacement de la charge de la preuve pour protéger les représentants en cas de baisse d'activité dans une certaine proportion. Il appartiendrait alors à la plateforme d'établir que cette baisse d'activité procède de motifs objectifs étrangers à l'exercice des fonctions de représentant.

4. Réglementer et contrôler les plateformes numériques de travail

Le rapport invite les pouvoirs publics à compléter les dispositions d'ordre public déjà applicables (protection des données, droit de la protection sociale, interdiction de licencier pour refus d'une prise en charge…) par d'autres dispositions impératives comme notamment :

- l'obligation de limiter le temps de conduite des VTC à soixante heures hebdomadaires et prévoir un droit au repos ;
- le durcissement des conditions de rupture de la relation entre la plateforme et le travailleur à l'instar de ce qui existe pour la rupture du contrat d'agent commercial ;
- la fixation par décret (ou par la négociation collective) d'une rémunération minimale pour les travailleurs des plateformes, qui correspondrait approximativement au SMIC horaire après couverture des coûts d'exploitation (pour les VTC, plateformes numériques de travail, cette dernière s'établirait à 7 € par course, assortie d'un tarif horaire minimum de 15 à 18 €, un même calcul devant également être effectué pour la livraison).

Le rapport propose également la création d'une autorité de régulation des plateformes, avec pour mission notamment de : présider à la mise en place du dialogue social au sein des plateformes, jouer un rôle de médiateur en cas de litiges entre plateformes et travailleurs de plateformes, prendre position sur la détermination et le calcul du tarif minimum fixé par la loi, rendre un avis sur les décisions d'octroi, de suspension ou de suppression des licences aux plateformes, organiser la négociation avec les plateformes sur le partage des frais de structuration collective via le recours à un tiers.

5. Compléter les fondations d'un « statut commun » pour toutes les formes de travail

Dans cette dernière partie, le rapport va au-delà de sa réflexion sur les plateformes de mobilité et tente de poser les fondements d'un futur socle de droits communs à l'ensemble des travailleurs.

Le rapport énonce que « toute personne qui travaille, c'est-à-dire qui est obligée en vue d'une œuvre commune, pour laquelle elle doit réagir à des objectifs chiffrés, doit bénéficier d'un socle minimum de garanties dans un statut commun des travailleurs ». Le rapport opte pour un renforcement des droits à la personne par des dispositifs comme le compte personnel de formation et les droits rechargeables. Face à la « mobilisation mentale constante », il s'agirait de reconnaître un droit commun au repos dans toutes les formes de travail. Tout travailleur doit aussi pouvoir bénéficier d'un droit effectif à la reconversion professionnelle, manifesté par l'accès à un temps long de formation sur le modèle du CPF de transition ou d'exercice d'une autre activité professionnelle, sur le modèle des droits accordés aux demandeurs d’emploi créateurs ou repreneurs d'entreprises.