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Lutte contre l'immigration irrégulière : la Cour des comptes égratigne la politique conduite par l'exécutif

Après s’être penchée, en 2020, sur l’intégration des personnes immigrées en situation régulière et sur l’exercice du droit d’asile, la Cour des comptes a rendu public le 4 janvier un rapport consacré à la politique de lutte contre l’immigration irrégulière, et notamment aux moyens mis en œuvre et aux résultats obtenus au regard des objectifs que se fixe l’État. À ce titre, les magistrats ont analysé les 3 grands volets de cette politique : la surveillance des frontières, la gestion administrative des étrangers en situation irrégulière sur le territoire national et l’organisation de leur retour dans leur pays d’origine.

À noter : ce rapport intervient alors que l’on attend encore la décision du Conseil constitutionnel sur le projet de loi Immigration qui a définitivement été adopté par le Parlement le 19 décembre dernier.

La gestion des frontières : « une pression croissante, une efficacité incertaine ». - Mesurée par plusieurs indicateurs, la protection des frontières incombe à 2 autorités « gardes-frontières » qui se partagent la tenue de 126 points d’entrée dans l’espace Schengen en provenance des pays tiers : la police aux frontières et les douanes. Depuis 2015, ces dernières sont aussi fortement mobilisées par le contrôle des frontières avec les autres pays de l’espace Schengen.

Censé être temporaire, ce rétablissement du contrôle des frontières intérieures dure depuis 8 ans et présente « une efficacité limitée », constate la Cour des comptes. Afin d’améliorer la surveillance des frontières, elle recommande d’aligner les pouvoirs d’inspection de la police aux frontières avec ceux des douanes, de revoir l’attribution des points de passage frontalier entre ces 2 administrations, ainsi que de recueillir et conserver l’identité des personnes interpellées à la frontière.

La gestion des étrangers en situation irrégulière : « des administrations et des juridictions sous pression ». - Les magistrats ont constaté que le cadre législatif de la lutte contre l’immigration irrégulière est « particulièrement mouvant » - il a connu 133 modifications en moins de 10 ans. Malgré la réitération régulière des priorités ministérielles au gré de l’actualité, les services administratifs et les juridictions chargés de la gestion des étrangers en situation irrégulière peinent à remplir leurs missions, du fait de leur manque de moyens. Avec 447 257 obligations de quitter le territoire (OQTF) prononcées entre 2019 et 2022, les préfectures sont saturées.

Comment sortir de l'ornière ? La Cour recommande de renforcer les moyens humains des services chargés des étrangers dans les préfectures et d’engager une simplification du contentieux des étrangers. De plus, les systèmes d’information visant à contrôler les frontières sont « insuffisamment interconnectés ». Enfin, le rapport souligne la nécessité que les ministères concernés apportent effectivement les moyens humains prévus au nouvel Office central de lutte contre le trafic illicite de migrants (Oltim).

L’éloignement : « un enchaînement d’obstacles structurels ». – Le retour d’une personne dans son pays d’origine peut être volontaire, aidé ou forcé. Dans les faits, l’éloignement forcé demeure majoritaire, car les personnes étrangères cherchent plutôt à se maintenir sur le territoire national. Or, l’éloignement forcé est contraint par plusieurs difficultés. D’abord, les centres de rétention administrative (CRA) manquent de policiers pour en assurer la surveillance, limitant ainsi les places disponibles. Aussi, depuis août 2022, le ministère de l’Intérieur concentre ses efforts sur les personnes susceptibles de causer un trouble à l’ordre public. Ensuite, entre 20 et 30 % des étrangers ne sont pas identifiés avec certitude, empêchant leur éloignement. Enfin, l’État rencontre des difficultés à obtenir les laissez-passer consulaires de la part des États d’origine des personnes concernées, ce qui conduit la Cour à préconiser une centralisation des demandes de laissez-passer.

Au total, malgré les moyens alloués, seules 12 % des OQTF sont exécutées. S’il est sans doute possible d’accroître ce taux par des mesures d’organisation, il apparaît « impossible d’éloigner l’ensemble des personnes faisant l’objet d’une OQTF ». En parallèle, la France accuse « un retard notable par rapport à ses voisins européens quant au déploiement de l’aide au retour volontaire, qui doit être développée ».

«  Des moyens importants, une cohérence à construire ». -  Le coût direct de la politique de lutte contre l’immigration irrégulière est d’environ 1,8 Md€ par an. Elle mobilise près de 16 000 fonctionnaires et militaires à temps plein. La police aux frontières est la seule force opérationnelle dont la lutte contre l’immigration irrégulière est une priorité permanente. L’organisation de cette politique incombe principalement au ministère de l’Intérieur, qui définit seul ses orientations stratégiques et pourvoit l’essentiel des moyens mobilisés. Dans ce contexte, la coordination interministérielle, en particulier avec le ministère de l’Europe et des affaires étrangères, est « insuffisamment développée ». Or, l’immigration irrégulière affecte un nombre important de ministères.

La Cour recommande donc de formaliser une stratégie interministérielle à 3 niveaux : au niveau français, elle fixerait le rôle de chaque ministère et identifierait les failles juridiques ; au niveau européen, la France doit poursuivre ses efforts de mobilisation des leviers européens, en particulier sur les visas, la politique commerciale et la protection des frontières extérieures ; enfin, la politique étrangère de la France devrait mieux prendre en compte la lutte contre l’immigration irrégulière, en particulier s’agissant de l’aide publique au développement et de la délivrance des visas.

In fine , la Cour des compte adresse à l’exécutif 10 recommandations :

  • Revoir la répartition des points de passage frontalier entre la police aux frontières et les douanes afin de confier à la première ceux dont le trafic des voyageurs a fortement augmenté et qui présentent des enjeux de sécurité importants ;

  • Recueillir et conserver les données d’identité des étrangers interceptés lorsqu’ils franchissent irrégulièrement les frontières intérieures et extérieures, via la constitution de systèmes d’information et d’un cadre juridique adapté ;

  • Aligner, sur la bande frontalière, les pouvoirs d’inspection de la police aux frontières sur le cadre applicable aux douanes en matière d’inspection de véhicules ;

  • Renforcer les effectifs des services chargés des étrangers en préfecture, afin d’améliorer la qualité des décisions et d’assurer la représentation systématique de l’État aux audiences devant le juge judiciaire et le juge administratif ;

  • Simplifier le contentieux de l’éloignement en réduisant le nombre de procédures juridictionnelles et en les distinguant selon le degré réel d’urgence ;

  • Améliorer l’urbanisation des systèmes d’information et applications utilisées pour le contrôle des frontières et le suivi des étrangers afin d’en simplifier l’utilisation et de renforcer la fiabilité des données ;

  • Centraliser la procédure de délivrance de laissez-passer consulaires, sauf pour les préfectures ayant un consulat à proximité ;

  • Identifier de manière systématique les obligations de quitter le territoire français prononcées pour troubles à l’ordre public et suivre l’exécution de la mesure d’éloignement ;

  • Rendre le dispositif de l’aide au retour volontaire plus souple en termes de personnes éligibles, de modulation du montant et de présence requise sur le territoire national ;

  • Formaliser une stratégie interministérielle de lutte contre l’immigration irrégulière, et s’assurer de sa mise en œuvre par une instance interministérielle.