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Crise de l'institution judiciaire : le comité des États généraux de la Justice en appelle à une prise de conscience collective

Le rapport du comité indépendant des États généraux de la justice a été remis vendredi 8 juillet au président de la République. Il est le fruit de près de 14 mois de travaux et de réflexion de la part des 12 membres de ce comité, présidé par Jean-Marc Sauvé. Près de 50 000 acteurs du droit, professionnels ou non, ont été amenés à donner leur avis, par le biais notamment de contributions collectives. Une méthode inédite, pour tenter de répondre à la crise profonde et préoccupante que connaît la Justice.

Au-delà de propositions ponctuelles, le comité « a surtout cherché à définir les priorités et les orientations dans lesquelles ces propositions ont vocation à s'inscrire ». Ainsi que l'a souligné J.-M. Sauvé à l'occasion de la restitution du rapport « l'aboutissement des États généraux n'est pas un empilement de textes mais un changement de méthode dans l'administration de la justice, d'une approche légicentrée à une approche systémique ».

Le constat : une crise majeure de l'institution judiciaire. - Augmentation constante des délais qui alimente un sentiment de « submersion et d'impuissance », insuffisance de moyens qui se traduisent par des outils et infrastructures informatiques obsolètes, grande difficulté pour la Justice à relever le défi du management, complexification du droit et des procédures nourrie par l'inflation législative, surpopulation carcérale… autant de constats sévères qui « confirment l'état de délabrement avancé dans lequel se trouve l'institution judiciaire », un point de rupture ayant été atteint avec la crise sanitaire. Les membres du comité ont entendu la grande souffrance, voire la honte, exprimée par les magistrats face aux difficultés indiscutables rencontrées lors de l'exercice de leurs missions (V. JCP G 2022, act. 3, Libres propos D. Salas), et ont été impressionnés par leur dignité et leur capacité « à faire des choses admirables » en dépit de ces difficultés.

Le diagnostic. - Cette crise est le résultat d'un ensemble de politiques publiques qui se sont révélées défaillantes sur la durée, avec une difficulté à penser la Justice de manière globale et systémique. Les réformes qui se sont multipliées au cours des dernières années ont fait office de « rustines » visant à « colmater des brèches dans un contexte de sous-dotation ». C'est pourquoi le comité propose quant à lui de procéder à une réforme systémique de l'institution judiciaire. « Le comité porte », selon son président, « une vision de l'avenir de la Justice cohérente » : la Justice est l'affaire de tous, tous les pouvoirs publics doivent être mobilisés. Il faut « rendre la justice au citoyen ». Voici quelques-unes des pistes proposées par le comité pour y parvenir.

Clarification du rôle de la justice dans la société. - Le comité propose afin de renforcer l'impartialité dans la nomination et la gestion des magistrats du ministère public de conférer au CSM un pouvoir d'avis conforme sur les propositions de nomination de ces magistrats ainsi que sur les sanctions disciplinaires qui les concernent.

Responsabilité pénale des décideurs publics. - Outre la suppression de la Cour de justice de la République, un alignement sur le droit commun des règles de procédure et de compétence applicables aux membres du Gouvernement est proposé. Un aménagement des règles de fond de cette responsabilité est recommandé lorsque les actes mis en cause pénalement découlent de la mise en œuvre de la politique du Gouvernement.

Renforcement de la première instance et retour à la collégialité. - Le jugement de première instance ne doit plus être considéré comme un « galop d'essai », l'appel doit être une voix de réformation et non plus d'achèvement.

Renforcement des moyens humains. – Il est préconisé une mise en place d'un référentiel d'activité objectif et le recrutement d'au moins 1 500 magistrats supplémentaires dans les 5 ans à venir, de 2 000 juristes-assistants contractuels, de 2 500 à 3 000 greffiers et d'au moins 2 000 agents. L'attractivité des emplois au ministère de la Justice doit en outre être améliorée.

Carte judiciaire. – Le comité ne souhaite pas de regroupements autoritaires mais est plutôt ouvert à des démarches concertées de fusion de juridictions « qui laisse subsister tous les sites judiciaires ».

Des réformes sectorielles sont également préconisées par le comité.

Justice civile. - Une véritable politique publique en matière civile est nécessaire, pilotée par la direction des Affaires civiles et du Sceau. Une responsabilisation des parties est souhaitée, avec un renforcement de la prise en charge des frais d'avocats par la partie perdante, qui soit en phase avec la réalité des frais engagés, avec un pouvoir maintenu au juge d'appréciation en ce domaine. Le développement des MARDS est approuvé par le comité mais ce mode de règlement des litiges ne doit pas être pensé « uniquement comme un moyen de limiter les flux entrants ».

Justice économique et sociale. - Le comité propose la mise en place d'un tribunal des affaires économiques aux compétences élargies pour l'ensemble des acteurs économiques quels que soient leurs statuts. Les conseils des prud'hommes seraient transformés en tribunaux du travail composés paritairement et rattachés au tribunal judiciaire.

Justice pénale. - Le CPP est illisible en l'état et doit être refondu. Le comité fait montre d'une volonté de simplification dans un objectif de cohérence, de lisibilité et de stabilité, qui ne doit pas conduire à remettre en cause la garantie des droits fondamentaux, le tout accompagné d'une très sérieuse étude d'impact, comme l'a précisé François Molins. À noter que le comité relève que le développement du pouvoir de sanction du parquet a atteint ses limites : il est une autorité de direction de l'enquête et de poursuite et doit en priorité le rester.

En matière pénitentiaire. - La fonction de réinsertion de la peine est réaffirmée afin de garantir un suivi individualisé et pluridisciplinaire, et de réduire les risques de récidives, ce qui, avec une limitation du nombre de courtes peines, pourra avoir un effet sur la surpopulation carcérale. « Rien n'est pire » comme le souligne J.-M. Sauvé « qu'une courte peine au cours de laquelle il ne se passe rien ». Un seuil d'alerte et de criticité pourrait être mis en place afin de réguler la population carcérale. Le Comité recommande également le retour des SPIP en juridictions.

Aide juridictionnelle. - La revalorisation de certains actes est préconisée ainsi que le renforcement du rôle de filtre par les BAJ.

Le Comité ne propose donc pas de « réponses immédiates », mais souhaite « instituer un mouvement », et en appelle à « une prise de conscience collective ». « C'est maintenant au Gouvernement, au Parlement et à tous les acteurs de la Justice de s'en emparer » a conclu J.-M. Sauvé. Une phase de concertation débutera le 18 juillet prochain qui, selon l'Élysée, permettra, dès la rentrée, « de mettre en œuvre des chantiers en profondeur avec les moyens nécessaires que la loi de programmation pour la justice aura à décliner ».

NDLR : entretien avec J.-M. Sauvé à paraître in JCP G