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Travail dissimulé - Application des règles de conflit de lois en cas de retrait des certificats E101/A1 et engagement de la solidarité financière du donneur d'ordre

Jurisprudence

La Cour de cassation a décidé : 1°) qu'en l'absence de certificat E101/A1 résultant d'un refus de délivrance ou d'un retrait par l'institution compétente, seule trouve à s'appliquer la législation de l'État membre où est exercée l'activité salariée ; 2°) que l'entreprise utilisatrice, informée de l'intervention de salariés, employés par une entreprise de travail temporaire, en situation irrégulière au regard des formalités mentionnées aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du Code du travail, doit enjoindre aussitôt à celle-ci de faire cesser sans délai cette situation. À défaut, elle est tenue solidairement avec elle au paiement des indemnités pour travail dissimulé.

Dans un arrêt du 4 novembre 2020 promis à la plus large des diffusions, la Cour de cassation se prononce sur : 1°) l'application des règles de conflit de lois en matière de sécurité sociale dans l'hypothèse du retrait des certificats E101 ou A1 émis par l'institution compétente de l'État d'établissement de l'employeur ; 2°) les conditions dans lesquelles la solidarité financière du donneur d'ordre en cas de travail dissimulé, prévue à l'article L. 8222-5 du Code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-790 du 10 juillet 2014, peut être engagée.

Étaient concernés plusieurs salariés, de nationalité polonaise et domiciliés en Pologne, qui avaient été mis à disposition d'une société de droit français spécialisée dans les travaux publics, par une entreprise de travail temporaire (ETT) de droit chypriote, entre le mois de mars 2010 et le mois de juin 2011, pour exercer une activité salariée sur le chantier de construction d'un réacteur nucléaire de nouvelle génération sur le site de Flamanville. Problème : les certificats E101 et A1 délivrés pour les salariés par l'institution compétente de l'État d'établissement de l'employeur, en l'occurrence la République de Chypre, avaient été retirés, sans que l'on sache les raisons de cette décision.

Toujours est-il que la justice a été saisie. Finalement, la Cour de cassation a eu à connaître des affaires en cause après que l'entreprise utilisatrice a formé un pourvoi contre l'arrêt d'appel ayant décidé, d'une part, que l'ETT avait exercé un travail dissimulé et a condamné cette dernière au paiement d'une indemnité forfaitaire à ce titre et, d'autre part, a déclaré engagée la solidarité financière de l'entreprise utilisatrice au titre de ce travail dissimulé sur le fondement de l'article L. 8222-5 du Code du travail.

• Conflit de lois en matière de sécurité sociale. – L'examen du pourvoi a requis, dans un premier temps, qu'il soit statué sur le conflit de lois en matière de sécurité sociale. En effet, les obligations de déclaration aux organismes de sécurité sociale prévues aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du Code du travail, définissant respectivement le travail dissimulé par dissimulation d'activité et le travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié, ne s'appliquent que dans la mesure où l'activité ou l'emploi salarié relève du régime français de sécurité sociale.

Au cas d'espèce, pour trancher la question de savoir quelle législation de sécurité sociale était applicable, la Cour de cassation s'est référée tant à la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne qu'aux dispositions de droit de l'Union applicables. Mise bout à bout, il s'évince des deux : 1°) que lesdites dispositions constituent un système complet et uniforme de règles de conflit de lois dont le but est de soumettre les travailleurs qui se déplacent à l'intérieur de l'Union européenne au régime de la sécurité sociale d'un seul État membre, de sorte que les cumuls de législations nationales applicables et les complications qui peuvent en résulter soient évités ; 2°) que ce système repose sur le principe de coopération loyale qui impose à l'institution de sécurité sociale compétente de procéder à une appréciation correcte des faits pertinents pour l'application des règles relatives à la détermination de la législation applicable et, partant, de garantir l'exactitude des mentions figurant dans le certificat délivré ; 3°) que ce principe implique également celui de confiance mutuelle ; 4°) qu'aux termes des dispositions de droit de l'Union applicables, la règle générale est celle de l'application de la législation de l'État d'exercice de l'activité salariée ; 5°) que font exception à cette règle les situations de travail détaché et d'exercice normal d'une activité salariée dans 2 ou plusieurs États membres.

La Cour de cassation énonce que l'institution désignée vérifie si une situation de détachement est caractérisée en sorte que la législation applicable est celle de l'État membre de cette institution ou détermine, dans une situation d'exercice d'une activité salariée dans 2 ou plusieurs États membres, quelle est la législation applicable. Cette institution est, dans le cas d'une situation de détachement, celle de l'État où l'employeur exerce normalement son activité. Dans le cas d'une situation d'exercice d'une activité salariée dans 2 ou plusieurs États membres, il s'agit de celle de l'État membre de résidence de la personne concernée. Selon le droit de l'Union, à la demande de la personne concernée ou de l'employeur, l'institution compétente de l'État membre dont la législation est applicable atteste, par la délivrance des certificats A1/E101, que cette législation est applicable.

Selon la Cour, la caractérisation de situations de détachement ou d'exercice d'une activité salariée dans 2 ou plusieurs États membres au sens des règlements de coordination ressort uniquement à la compétence soit de l'institution compétente de l'État membre dans lequel l'employeur exerce normalement son activité, dans le cas où une situation de détachement est alléguée, soit, dans le second cas, de l'institution désignée par l'autorité compétente de l'État membre de résidence.

Elle constate que le système complet et uniforme de conflit de lois institué par le droit de l'Union, sauf fraude et lorsque l'État membre de résidence et l'État membre où est exercée l'activité salariée ne coïncident pas, ne confère aux institutions compétentes de ce dernier État ou à ses juridictions nationales aucune compétence pour procéder à une telle caractérisation afin de retenir l'application d'une loi autre que celle de cet État. Les juges du droit en déduisent, enfin, que, en l'absence de certificat E101/A1résultant d'un refus de délivrance ou d'un retrait par l'institution compétente, seule trouve à s'appliquer la législation de l'État membre où est exercée l'activité salariée. Cette conclusion était tellement évidente à la chambre sociale qu'elle n'a pas jugé nécessaire de poser de question à titre préjudiciel à la Cour de justice de l'Union européenne.

In fine, elle a donné raison aux juges d'appel qui, après avoir constaté que les salariés mis à disposition de la société française exerçaient une activité salariée sur le territoire français et que les certificats A1/E101 délivrés par l'institution compétente chypriote avaient été retirés, ont retenu que ces salariés étaient soumis à la législation française.

Dans de telles circonstances, les employeurs établis dans d'autres États membres que la France sont soumis aux obligations de déclaration aux organismes de sécurité sociale prévues aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du Code du travail.

• Engagement et étendue de la solidarité financière du donneur d'ordre. - Dans un second temps, la Cour se prononce sur les conditions dans lesquelles la solidarité financière du donneur d'ordre prévue à l'article L. 8222-5 du Code du travail peut être engagée ainsi que sur l'étendue de celle-ci.

L'entreprise utilisatrice, à l'origine du pourvoi, soutenait que cet article ne couvre pas l'intervention d'uneETT en situation irrégulière et que la solidarité financière qu'il prévoit ne porte pas sur l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé. Dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-790 du 10 juillet 2014, celui-ci fait obligation au donneur d'ordre, informé de l'intervention d'un sous-traitant ou d'un subdélégataire en situation irrégulière au regard des formalités mentionnées aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 de ce code, d'enjoindre aussitôt à son cocontractant de faire cesser sans délai cette situation. À défaut, il est tenu, selon cet article L. 8222-5, solidairement avec son cocontractant au paiement des impôts, taxes, cotisations, rémunérations et charges mentionnés aux 1° à 3° de l'article L. 8222-2, dans les conditions fixées à l'article L. 8222-3.

La Cour relève que sont mentionnées, à l'article L. 8222-2, 3° les rémunérations, les indemnités et les charges dues par celui qui a fait l'objet d'un procès-verbal pour délit de travail dissimulé, à raison de l'emploi de salariés n'ayant pas fait l'objet de l'une des formalités prévues aux articles L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche, et L. 3243-2, relatif à la délivrance du bulletin de paie, du Code du travail. Par ailleurs, les articles L. 8222-2 et L. 8222-5 figurent dans le chapitre du code intitulé « Obligations et solidarité financière des donneurs d'ordre et des maître d'ouvrage » qui instaure, par les dispositions qu'il prévoit, au bénéfice du Trésor, des organismes de sécurité sociale et des salariés, une garantie de l'ensemble des créances dues par l'employeur qui exerce un travail dissimulé à la charge des personnes qui recourent aux services de celui-ci afin de prémunir ces créanciers du risque d'insolvabilité du débiteur principal. Pour les juges du droit, il résulte de l'objet et de l'économie de ces dispositions que ce mécanisme de garantie est applicable aux créances indemnitaires pour travail dissimulé des salariés employés par des entreprises de travail temporaire. Aussi, la chambre sociale interprète les articles L. 8222-2, 3°, et L. 8222-5, alinéas 1 et 2, du Code du travail, en ce sens qu'il appartient à l'entreprise utilisatrice, informée de l'intervention de salariés, employés par une ETT, en situation irrégulière au regard des formalités mentionnées aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 de ce code, d'enjoindre aussitôt à celle-ci de faire cesser sans délai cette situation et que, à défaut, elle est tenue solidairement avec l'ETT au paiement des indemnités pour travail dissimulé. Tel n'avait pas été le cas en l'espèce.